Histoire de l'art japonais à la Takashi Murakami - le contraire du raffinement

L'artiste pop né à Tokyo, qui a travaillé avec Louis Vuitton, Billie Eilish et d'autres, juxtapose l'art ancien, la politique moderne et ses propres logos avec un effet étonnamment anodin.

Le phénomène Takashi Murakami — reconnaissance mondiale de sa marque, complicité implacable avec le marché — est tellement synonyme d'argent qu'il est difficile de regarder sa nouvelle exposition sans y voir avant tout de la marchandise. Chez Gagosian, il y a un garde du corps vigilant pour deux tableaux.

Énormes, rutilantes et foisonnantes, ces « interprétations » de l'art japonais sont parmi les plus grandes œuvres de Murakami, grâce à la combinaison de couleurs criardes et de personnages caricaturaux tirés d'anime et de manga qui sont sa marque de fabrique. Mais que signifie réellement ce titre : que fait Murakami de l'histoire de l'art japonais ?

Sa propre place dans la culture japonaise est célèbre et fixe. Il est né à Tokyo en 1962 et son œuvre a littéralement engendré son propre mouvement, connu sous le nom de Superflat, nom qu'il a inventé en 2000. Ce mouvement reprend la « planéité » caractéristique de l'art japonais et l'oriente résolument vers le design, en supprimant la perspective, en condensant les éléments de style, en ajoutant ses logos d'yeux ahurissants, de crânes brillants et de tournesols souriants.

En 2002, invité à collaborer avec Louis Vuitton, il a intégré ses logos dans les créations de maroquinerie de la marque de luxe (cette ligne se poursuit encore aujourd'hui). L'échange s'est fait dans les deux sens lorsque Murakami a commencé à incorporer le monogramme LV dans ses peintures. C'était bien avant que Yayoi Kusama ne vende ses spots à la société ou que Damien Hirst ne réalise des écharpes papillon pour Alexander McQueen.

Murakami a également collaboré avec Issey Miyake, Kanye West, Pharrell Williams et Billie Eilish, avec qui il a cocréé une vidéo animée pour l'un de ses titres en 2019.

Parfois, les variations ont un effet minime. Il y a de ravissantes images de chrysanthèmes, avec derrière eux une rivière qui serpente au loin, sur fond de feuilles d'or. La rivière est une abstraction entièrement stylisée, et la « Murakamisation », comme on l'appelle, consiste simplement à insérer des smileys au centre de chaque fleur.

Sa version du paravent des paons d'Ogata Kōrin datant du XVIIe siècle — un trésor national au Japon — Murakamise les yeux dans les plumes du paon mâle, mais dans quel but ? Le guide de la galerie nous invite à penser au « raffinement de la culture aristocratique », mais ce que l'on voit est tout le contraire du raffinement.

Les objets rapportés ne semblent être là que pour justifier la présence de l'artiste et la patte qu'il est censé apporter à l'œuvre.

Il peut être humoristique. Un personnage de manga se déplace sur un nuage zen d'acrylique blanc brillant. L'air s'élève en spirales d'or gaufrées, comme un papier peint super cher. Il réalise des dragons mythologiques massifs respirants des volutes multicolores qui peuvent vous faire penser à La Nuit étoilée de Van Gogh ; un rappel pétillant de la dette du Néerlandais envers l'art japonais.

Mais plus la composition est grande, plus « Mais où est donc Wally ? » Murakami devient. Parmi les scènes de cueillette d'eau, d'observation des cerisiers en fleurs, de guerre, de danse et d'amour courtois, il plante l'une de ses figurines ridicules de M. Dob, comme un Mickey aux yeux d'insecte — sans autre raison, semble-t-il, que le jeu de piste taquin pour la trouver.

Toutes les centaines de petites figurines disposées dans un paysage massif d'eau et de montagnes bordées d'arbres ont des yeux écarlates ou cobalts, sans autre raison que les couleurs chimiques modernes. Chaque figure délicate est rendue aussi grossièrement que si elle avait été estampée par une machine à tir rapide.

Murakami a également repris les locaux de Gagosian, près de la Royal Academy, et les a transformés en boutique : des peintures de fleurs multicolores et souriantes à l'étage, des tirages abordables au rez-de-chaussée. Il est le Hello Kitty de l'art japonais.

Pourtant, nous devons considérer que l'exposition principale a de la gravité, qu'il réfléchit à « l'érosion de l'ancienne splendeur de la nation » et à la manière dont elle a été modifiée par de nouvelles esthétiques. Dans cette boucle de rétroaction, l'érosion et l'altération ne sont pas seulement reflétées, mais aussi exacerbées par son propre travail.

Cependant, les dragons et les créatures mythiques de Murakami sont aimables au point d'être mignons. Sa geisha a d'énormes yeux de manga. Son hibou est curieusement fantaisiste. Loin de la politique pointue ou des antagonismes vantés de son art, ou même des supposés aperçus de l'histoire de l'art, le principal atout de Murakami dans cette exposition est plus la gentillesse que la catastrophe. La véritable surprise est de constater à quel point ces œuvres sont douces et anodines.